" Des fleurs en production locale et circuit-court pour les fleuristes "
Camille Pénisson produit des fleurs coupées à Port-Sainte-Foy-et-Ponchapt (24), non loin de Bergerac. Soucieux des personnes et de l'environnement, il allie transmission familiale, savoir-faire, pratiques respectueuses, production locale, circuit court, produits frais et avancées techniques... afin de valoriser les végétaux de l'entreprise.
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Héritage de ses arrière-grands-parents, l'entreprise sur laquelle Camille Pénisson s'est installé en 2004, a été spécialisée en fleurs coupées et fleurettes de saison par son père dans les années 1970. Les aïeux cultivaient en polyculture, puis les grands-parents se sont orientés vers le maraîchage et les fleurs, et le père a arrêté le maraîchage. L'installation de Camille Pénisson a donné lieu à une extension foncière et à un développement de la production sur deux sites, ses parents n'ayant alors pas encore l'âge de la retraite.
Une large gamme de fleurs coupées... Spécialisée en fleurs coupées, l'entreprise cultive une gamme très diversifiée. Un choix lié au système de commercialisation, avec deux types de gammes : d'une part les productions à l'année, Gerbera, Gerbera germini, Anthurium, Alstroemeria, lys et quelques roses ; et d'autre part les fleurs et fleurettes de saison. Cette diversité implique une technicité forte et un suivi précis des antécédents culturaux afin d'optimiser les surfaces et de limiter les risques sanitaires.
La protection biologique intégrée (PBI) est intégrale. Le sol est systématiquement désinfecté, à la vapeur ou par solarisation, afin de limiter les problèmes de champignons ainsi que le développement des adventices. Le choix de techniques naturelles est lié à la conduite intégrale des productions en PBI, certifiée par le label Plante Bleue. Il est ainsi possible de réintroduire des auxiliaires tout de suite après une désinfection à la vapeur. « La démarche en PBI s'inscrit dans nos valeurs, explique Camille Pénisson, le respect des personnes, le respect de l'environnement, nous voulons utiliser un minimum de produits phytosanitaires. » Semis ou plantations sont réalisés en continu, pour échelonner les floraisons. En moyenne, deux cultures se succèdent sur une année sur la même surface. Par exemple une culture de Lisianthus, qui fleurit en juillet, suivie d'une replantation d'oeillets de poète et de choux décoratifs pour l'hiver. Les Freesia, plantés en août, pour une floraison de mi-novembre à mi-février, demandent un rafraîchissement des sols, obtenu par le paillage. Les Alstroemeria restent en place entre 4 et 5 ans, et nécessitent un refroidissement encore plus conséquent, par des tuyaux dans lesquels circule de l'eau froide.
Un nouveau ravageur à surveiller et à gérer sur Gerbera. Cette culture est particulièrement technique : elle se fait dans une serre éclairée 12 h par jour pour la photosynthèse, avec un enrichissement en CO2, un climat au sein de la serre géré informatiquement, un chauffage basse température sous les plantes. Celles-ci sont individualisées dans des pots, afin de limiter la propagation du Phytophtora. De même, la solution d'irrigation est récupérée mais pas réutilisée sur la même culture, toujours pour éviter les risques. Elle est épandue sur des cultures extérieures. Les plantes sont cultivées sur un substrat en fibre de coco, l'ensemble assurant une productivité élevée. La production se fait en PBI totale, avec des seuils d'intervention assez hauts, afin d'utiliser le moins possible de produits phytopharmaceutiques. Un nouveau parasite est apparu l'an dernier dans le sud-ouest, le papillon Duponchelia fauvealis, dont la femelle pond sur le substrat et les chenilles mangent les racines et le collet des plantes. Un piégeage des mâles, avec des phéromones, donne des résultats satisfaisants. Le parasite semble être présent sur Gerbera, Cyclamen et poireau. Les arbustes à feuillage comme les Eucalyptus, demandent moins de soins. Cultivés en plein air, ils sont rabattus à 1 mètre au mois d'avril ; le feuillage est récolté pour la commercialisation à partir d'août et tout l'hiver.
Deux hectares de pivoines en pleine terre. Cette production est cultivée sur buttes. Elles sont désherbées par un robot bineur, qui se repère par rapport aux buttes quand il n'y a plus de feuillage. Sur les 2 hectares en culture, 1 hectare est recouvert fin janvier d'un tunnel de forçage, afin de hâter la floraison, pendant 3 semaines à 1 mois. Les pivoines sont commercialisées en gros auprès d'une chaîne de grossistes, capable d'absorber la production de 2 hectares. « Avant 2006, nous en avions 2 000 m2 et cela nous suffisait pour notre marché de fleuristes. Nous avons choisi d'aller plus loin, explique Camille Pénisson, afin d'optimiser le process de culture et le travail du sol : pour cette surface, nous réalisons de substantielles économies d'échelle. » Sur le site de la serre froide, le système de culture a été repensé pour être adapté au robot de désherbage. Les rangs sont écartés pour que le robot puisse circuler, des marqueurs sont placés au bout des rangs pour lui permettre de tourner. « Le robot nous permet de ne plus utiliser de désherbants, confirme Camille Pénisson, ce qui pour moi était très important, tant pour le confort des personnels que pour l'environnement. » Le sol est travaillé avec des griffes pour en respecter les strates, la désinfection à la vapeur est pratiquée sur les planches de culture. « Nous réalisons deux faux semis avant la remise en culture et ensuite le robot fait son travail. »
La vertu de l'origine... Côté résultats économiques, Camille Pénisson s'avère très franc et lucide : « La rentabilité de l'exploitation tend à être nulle : l'entreprise paie ses salariés, ses charges et ses emprunts, mais elle ne dégage pas de marge pour son développement. Nous sommes tributaires de la globalisation des échanges, qui s'est accélérée ces 10 dernières années. Une fleur du Kenya arrive aujourd'hui en 24 heures sur nos marchés, avec des coûts de main-d'oeuvre complètement différents : nous ne sommes pas sur les mêmes échelles humaines. » La fleur coupée est exigeante en temps de main-d'oeuvre au quotidien, et en investissement matériel. Les marchés mondiaux, et notamment l'arc équatorial, sont très organisés et livrent très rapidement des fleurs bon marché. Sur la majeure partie des circuits de distribution, l'argument de vente est devenu le prix, c'est ce qui représente les volumes principaux de la consommation. « Nous ne pouvons pas être placés sur ces marchés de prix et d'achat d'impulsion, reconnaît le producteur, mais nous avons une autre histoire à raconter. Ce qui importe, c'est la façon dont nous produisons et commercialisons nos fleurs : une production locale, des produits très frais, un circuit très court, des fleurs à travailler pour le fleuriste. La vertu de l'origine nous maintient ! »
L'avenir est dans les légumes ? C'est cette reconnaissance de la « vertu de l'origine », qui a justifié la création d'un atelier de légumes de plein champ, porté par le frère de Camille Pénisson, Raphaël Pénisson. Ce dernier avait développé pendant quelques années la culture de légumes biologiques à Madagascar. Au printemps 2017, il est revenu cultiver des légumes de plein champ, sur les terres acquises en 2004, pour approvisionner un marché de gros local, qui manquait de producteurs. « Nous sommes sur le territoire de l'ancienne députée Brigitte Allain, raconte Camille Pénisson, qui a présenté une loi sur l'approvisionnement des restaurants collectifs en produits biologiques et locaux. Ici c'est un mouvement très fort et donc une demande qui va avec. Par ailleurs, le calendrier de production des légumes est complémentaire avec le travail des fleurs, les salariés sont ponctuellement sollicités sur cet atelier, sinon c'est mon frère qui le gère seul. » Pour la famille, la question du futur n'est pas tranchée : « Sur le long terme, je crois que le marché est là pour notre avenir dans les légumes, réfléchit Camille Pénisson. Et à court et moyen termes dans les fleurs coupées. Peut-être serons-nous amenés à nous spécialiser davantage pour optimiser les coûts de production. »
Cécile Claveirole
Produites près de Bergerac, les fleurs sont vendues dans le sud-ouest de l'Hexagone, avec une identification du lieu et des modes de production.
Les Gerbera sont cultivés en pots, pour éviter les contaminations fongiques, et dans un substrat de fibre de coco.
Avec l'arrivée du robot bineur, l'usage de produits phytosanitaires a été réduit au maximum. Cet outil permet de préserver la santé des personnels et de protéger l'environnement.
Les griffes de renoncules sont plantées largement pour laisser le passage nécessaire au robot de désherbage.
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